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8 juillet 2015 3 08 /07 /juillet /2015 20:16
Têtes de Turcs

Un vol de 3 heures sur Turkish Airlines, un après-midi de shopping dans un Mall d’Istanbul et une soirée d’hôtel m’auront suffi pour aimer ce peuple et commencer à l’apprécier à sa juste valeur.

Je vous trouve durs, tous autant que vous êtes, vous et vos idées reçues sur les Turcs, sur les différences culturelles entre eux et « nous » ( ?), annonçant une entrée dans notre belle Europe au forceps, dans la douleur et contre nature.

D’accord, ils ne sont pas beaux.

Enfin, les jolis Turcs sont manifestement tous en Suisse parce qu’ici, je n’en ai pas vu un seul. Remarquez, les Valaisans vieillissent mal eux aussi, mais ils sont au moins mignons entre 18 et 25 ans, avant qu’ils ne se turquisassent en prenant du poids et du poil un peu partout, d’abord par de minables moustaches ou d’hirsutes barbes néanderthaliennes, puis très vite par une épouvantable toison envahissant dos et épaules.

Remarquez, il souriraient de temps en temps que cela passerait certainement plus inaperçu.

Mais non ! Stop ! Que les mots « black », « big », « cold » ou même « train station » plongent n’importe quel Turc non universitaire devant un indéniable abîme de perplexité, n’est pas une raison non plus pour leur claquer la porte d’un continent au nez, d’autant que plusieurs pays du tiers monde en font déjà partie, y compris francophone, et que nous autres Suisses serions gonflés d’avoir un avis sur une Union que nous avons refusée il y a plus de 20 ans.

Et puis, je ne sais plus qui a dit que la communication était à 80% non verbale. Il y a par exemple la religion, commune avec la France...

Donc arrêtons de caricaturer. Rien ni personne n’est jamais ni noir ni blanc. Surtout là-bas.

Je me suis tout au plus interrogé sur le comportement du Günter Wallraff derrière lequel j’attendais sur la ligne de courtoisie, lors du contrôle passeports de l’aéroport Atatürk, lorsqu’il semblait hurler qu’il n’était pas question que ses quatre épouses en burqa dévoilassent plus que des parties traditionnellement ouvertes au public – de touffus sourcils – avant de les autoriser, une après l’autre et à son signal, à soulever une partie de leur voilage pour prouver qu’elles ressemblaient à la photographie d’un passeport qu'il conservait en sa seule maîtrise.

Ce genre de scènes mises à part, relève de l’idée reçue – et du souvenir d’un Coluche tendancieux – la définition de la fillette vierge d’ici comme étant "celle qui court plus vite que son père".

Pour preuve : le pays a officiellement aboli la peine de mort. C’est le frère de ladite fillette, quand elle a grossi quelques années trop tôt et en a perdu la course sus-évoquée, qui reste chargé de laver son honneur en la faisant disparaître une fois pour toutes.

Même « fort comme un Turc » n’est pas moins stigmatisant que de penser que les Africains ont un gros sexe, au contraire des Japonais. Ce n’est pas vrai ! Enfin, pas toujours.

C’est en tout cas aussi bête que les expressions « râleur comme un Français », « saoul comme un Polonais », « donneur de leçon comme un Français », « fier comme un Italien », « chauvin comme un Français », « bête comme un Belge », « jamais content comme un Français », « snob comme un Anglais », « feignasse comme un Français », « poilu comme une Portugaise », « gonflé comme un Français » ou « lent comme un Suisse ».

Ce dernier cliché est scandaleux !

Et pourquoi pas, tant qu’on y est et pour revenir à nos Turcs, céder à la facilité vulgaire d’un « ça bosse fort aux Dardanelles » ? à ce point mauvais qu’il prouve une fois de plus que le calembour n’est que la fiente de l’esprit.

Ces lieux communs racistes et islamophobes dégoûteront l’homme raisonnable dans quelques années, comme Tintin au Congo dégoûte l'homme raisonnable d'aujourd’hui. Ça fait rire, mais jaune ; un ricanement qui ne nous honore guère. Qui ne m’honore guère, ok. Je mériterais la fessée à ricaner aussi bêtement, comme quand je pense à ces féministes qui tentent de nous imposer un langage épicène, en supprimant tous les masculins des textes officiels. Dans dix ans, tout porte à croire qu’on dira « Quelle heure est-elle ? » et « Elle va neiger cette nuit ». Heureusement, on pourra continuer à dire « IL te demande de faire a vaisselle ! », car le contraire serait absurde.

BREF !

Ce même homme raisonnable ne peut que concéder que les Turcs ont une place à part entière dans la « Grande Europe », celle rêvée par les lecteurs du Nouveau Quotidien violet de l’époque, par les enfants et leurs idéaux ou par les adultes et leurs intérêts.

L’Europe ne peut raisonnablement se faire une liposuccion sur une Grèce indésirable et rejeter par avance la transplantation d’une Turquie qu'elle méjuge à la hâte.

N’importe quel homme raisonnable ressentira l’européenne fratrie qui l’unit au peuple turc ; n’importe quel homme raisonnable, Français, et surtout Allemand.

Eh bien justement !

Tout ça convaincra n’importe quel homme raisonnable que la Suisse, avec l’égoïsme de ses 3% de chômage, l’arrogance d’une balance excédentaire, l’indécence d’un salaire moyen à €5'000.-, la concurrence déloyale d'impôts trois fois moins élevés que partout ailleurs, la couardise et la tiédeur d’un Etat libéral qui ne se mêle pas des vies privées, l’indigence de lois réduites à quelques articles de principe et l’ennui mortel que suscitent des relations humaines et professionnelles sans conflit, n’est quant à elle ni digne ni prête pour mettre dans cette belle Union ne serait-ce que le bout de son nez.

C’est super rare mais je me sens très raisonnable, sur ce coup.

J'espère seulement que mes amis français verront dans ces lignes la tendresse taquine mais sincère que j'éprouve vraiment pour eux.

Il est vrai certainement qu'il est plus facile d'éprouver des sentiments aussi forts tant qu'on ne vit pas en permanence sous le même toit.

Allez, bisous mes lapins. Et sans rancune, hein !

Mais c’est vrai, je n’ai rien à craindre de ce côté-là : on peut dans votre pays impunément manier la satire, jusqu’à l’affront selon l'envie, car la Révolution a érigé la liberté d’expression au rang de principe excluant autant l’autocensure que la responsabilité.

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